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Les 4 facettes de la photographie de mariage

La photo de mariage présente la particularité de susciter des difficultés juridiques à différents égards, qu’il est bon de ne pas perdre de vue. Sans rentrer dans une analyse détaillée qui dépasserait le cadre d’un article, il me parait intéressant de rappeler les grandes lignes.

J’évoquerai dans l’ordre :

  • LA QUESTION DU STATUT DU PHOTOGRAPHE
  • LES RÈGLES CONTRACTUELLES « DE DROIT COMMUN »
  • LE DROIT À L’IMAGE DES MARIÉS
  • LA PROTECTION DES DROITS D’AUTEUR DU PHOTOGRAPHE

LE STATUT

Un photographe qui souhaite se lancer dans la photo de mariage doit impérativement être un professionnel, et qui plus est sous un statut d’artisan s’il est en personne physique, ou bien sûr de société.

Ce type de prestation n’est absolument pas ouvert aux auteurs, qui dépendent de l’Agessa  et ont un statut d’artiste. S’ils décidaient de se lancer malgré tout dans l’opération, qu’il soient conscients de ce que cela se ferait au risque d’une part de redressements et sanctions pour travail dissimulé, et d’autre part, d’une action en concurrence déloyale de la part des photographes régulièrement inscrits.

Sur ce dernier point, l’explication est la suivante : le photographe était sous un statut d’artisan (quel que soit son régime fiscal, et y compris celui de l’auto-entrepreneur) doit supporter des charges sociales lourdes, une TVA (quand il y est assujetti) au taux plein, et toutes les contraintes d’une activité financièrement coûteuse.  L’auteur (ou même le photographe amateur) qui viendrait ainsi marcher sur ses plates-bandes pourrait alors :

  • soit proposer des prestations moins chères, n’ayant pas à supporter l’ensemble des charges,
  • soit s’aligner sur les prix des professionnels, mais en dégageant alors un bénéfice plus important (en plus d’être illégal), puisque celui-ci ne serait pas amputé des charges correspondantes.

A ce titre donc, il s’exposerait à une action de la part des photographes inscrits.

Je détaille en outre dans l’ouvrage « Vendre ses photos » (Ed. KnowWare) les moyens que le législateur a mis en place pour aider les contrôleurs de l’Urssaf dans leur chasse aux travailleurs illégaux, et les sanctions qui sont prévues par la loi, et de nature à faire réfléchir tout candidat à cette activité. Veillez donc bien, avant de vous lancer dans l’aventure, à être titulaire d’un numéro de Siret correspondant à une activité légalement déclarée, avec un Code APE autorisant ce type de prestations (idéalement 74.20Z).

LES RÈGLES CONTRACTUELLES DE DROIT COMMUN

Dès lors qu’il est régulièrement inscrit, l’artisan-photographe pourra alors songer à proposer un contrat aux futurs mariés qui le contacteront. Avant même d’envisager les aspects intimement liés à la photographie, rappelons que ce contrat est soumis, comme n’importe quel autre, aux règles du Code civil.

Ainsi, une partie qui n’aurait pas exécuté ses engagements pourrait être poursuivie par l’autre partie pour tous types d’actions contractuelles. Ce ne sont pas les sources de conflit qui manquent, parmi lesquelles, à titre d’exemple :

  • remboursement de l’acompte et dommages et intérêts dans l’hypothèse où le photographe ne se serait pas présenté le jour de la cérémonie,
  • à l’inverse, action en paiement du photographe qui n’aurait pas reçu le solde de son prix après la livraison des photos.

Et tous types de situations intermédiaires ou l’une ou l’autre des parties se plaint d’une mauvaise exécution du contrat par l’autre. Même si l’objet même du contrat revêt nécessairement pour les mariés une importance personnelle considérable, les règles à appliquer seront les règles classiques du Code civil.

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Consultez aussi l’avis d’Amandine Thomas Photographe, à propos de ce livre

LE DROIT À L’IMAGE

Vient ensuite le moment de livrer aux mariés leurs tirages et albums. De votre côté, heureux du résultat de l’opération, vous allez bien entendu utiliser les meilleures de ces photos pour faire la promotion de votre travail.

C’est à ce moment que, parfois, les jeunes mariés s’indignent de ce que les photos de cet événement familial se retrouvent affichées sur votre page professionnelle, et réclament au titre de leur droit à l’image que celles-ci soient retirées de votre site.

Puisque la notion de droit à l’image, en France, est essentiellement issue de la jurisprudence, elle est par nature fluctuante, et il y a un risque que l’utilisation, dans le chef du photographe, soit considérée comme purement « commerciale » (la promotion de son activité), de telle sorte qu’un magistrat pourrait être amené à ordonner la suppression des photos. Pour cette raison, il est important de bien prévoir cet aspect dans le contrat, quitte à limiter le nombre de photos que vous utiliserez. L’existence d’un contrat signé à cet égard sera de nature à limiter ou supprimer les risques de procédure.

LE DROIT D’AUTEUR

Enfin, reste la question de l’utilisation de vos photos soit par les mariés eux-mêmes, soit par des tiers, éventuellement concurrents.

Vous êtes titulaires de droits d’auteur sur ces photos, et à ce titre vous pouvez vous opposer à ce qu’on les utilise au-delà du cadre familial des mariés. Toute cession de droits ou utilisation non-autorisée sera, juridiquement, une contrefaçon. Restera alors à faire valoir vos droits.

A nouveau, un minimum de prévention reste possible en attirant l’attention des mariés sur les utilisations qu’eux-mêmes ont le droit d’envisager avec les tirages vendus, ou celles qui au contraire leur sont totalement interdites. Ceci n’évitera pas le risque qu’un tiers s’empare des images à son profit, mais vous aurez au moins limité les sources de conflit avec les mariés eux-mêmes.

Parmi ces tiers, il arrive de plus en plus souvent que des concurrents utilisent les photos pour garnir leur propre site, vantant ainsi un savoir faire qui n’est pas le leur. A ce niveau, vous aurez alors le choix entre une action en contrefaçon ou, plus efficace sans doute, une action purement commerciale sur base de la notion de parasitisme et de concurrence déloyale.

Dans tous les cas de litige, veillez à bien vous constituer des preuves PREALABLES à tout envoi de mise en demeure, faute de quoi l’infraction risque bien de disparaître sans que vous ayez eu le temps de pouvoir en démontrer la réalité.

* * * * *

Je reviens de temps à autre sur mon blog sur des affaires relatives à des photos de mariage, quel que soit l’angle sous lequel le sujet est abordé. Citons par exemple :

Bonne continuation dans votre activité.

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Droit & Photographie | Joëlle VERBRUGGE – Avocate et auteur-photographe

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3 Comments

  1. Bonjour et merci pour votre article qui est très clair.

    J’ai un petit soucis avec la photographe de mon mariage. Nous n’avons pas établie de contrat, pas de devis signés, pas de facture.
    Accord commun : Couverture des préparatifs, shooting couple/famille (avec notre fille de 3 ans) et présence à toutes les cérémonies jusqu’à 22h.
    Livraison : 80 photos retouchées.

    Aujourd’hui elle me livre les photos, je lui demande si c’est possible d’avoir toutes les photos même en BD. Elle me répond que non, du coup je lui demande combien ça me couterait et elle me dit que même en payant elle ne me les livre pas. Si je veux elle me fait une planche des photos, je fais une sélection et elle retouche et pour une vingtaine me prend 80€.

    Nous avons payé 590€ pour sa prestation. Maintenant je ne sais pas si elle est déclarée en tant que photographe ou autre. Mais j’aimerai savoir si on a pas un droit d’image ou d’accès à nos informations personnelles puisqu’en fait je ne sais même pas si elle a un statut juridique … Je ne la trouve pas sur Societe.com ni nulle part ailleurs en fait.

    Je sais bien que nous aurions du faire un contrat, mais du coup, comment ça se passe dans mon cas :/ ?

  2. Patrick Henri Reply

    Bonjour,
    « Un photographe qui souhaite se lancer dans la photo de mariage doit impérativement être un professionnel, et qui plus est sous un statut d’artisan » ce qui me pose question c’est le mot « impérativement » et « statut d’artisan ».
    quels sont les sources juridiques de cette affirmation du monopole du statut « artisan » svp ? (textes de lois) est ce qu’il y a une jurisprudence à ce sujet, car je n’ai pas trouvé.
    Qu’est ce qui interdit à un auteur-photographe qui a besoin de photos pour illustrer un thème mariage pour sa photothèque de faire des photos de mariages ? Quelle texte officiel interdit à un auteur-photographe de vendre des tirages d’art de mariage numérotés, signés en moins de 30 exemplaires ? (= définition légale de l’oeuvre d’art). Quel texte indique qu’une photo de mariage ne peut être une oeuvre d’art ? Je suis très curieux sur ce sujet complexe. Je parle d’un auteur dont la photo d’une part et la photo de mariage d’autre part n’est pas son activité principale mais déclaré au CFE et aux Impôts comme auteur-photographe. Est ce que ce que vous indiquez de manière « impérative » ne concernerait pas que les photographes qui font des reportages de mariages leur activité principale dans le but de vendre des produits commerciaux (nombre illimités de tirages, livre photo, fichiers numériques) ? . Merci des éclaircissements. Bien à vous.

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